Sondage - Près d’un Français sur deux déclare être concerné par une addiction
Une nouvelle étude réalisée par OpinionWay pour Addictions France en mars 2025 [1], révèle que les addictions touchent 47 % des Français, qu’ils soient directement concernés ou via un proche. En dépit de cette forte prévalence, moins d’1 personne concernée sur 2 déclare avoir cherché de l’aide. Freins majeurs à la recherche d’aide : la peur du regard des autres et le manque d’information sur les structures existantes.
Les addictions : un phénomène social bien installé mais peu assumé
Selon les résultats du sondage, 33% des Français souffrent d’au moins une addiction, le tabac en tête (16%), suivi par l’alcool (8%), les écrans (8%) et les médicaments (4%). Les jeunes et les catégories socio-professionnelles défavorisées semblent particulièrement touchés : 4 jeunes sur 10 sont concernées par une addiction. Cette même prévalence se retrouve également dans la catégorie socioprofessionnelle CSP-.
Ce chiffre augmente lorsqu’on interroge les Français sur leur entourage : 39% affirment avoir au moins un proche concerné par une addiction. Là encore, le tabac arrive en première position (20 %), suivi par l’alcool (14 %), les écrans (8%), le cannabis (6 %) et les médicaments (4%).
L’écart entre la perception de sa propre addiction et celle d’un proche est particulièrement marqué pour le tabac, l’alcool et le cannabis. Cette différence met en lumière la difficulté à reconnaître une conduite addictive chez soi-même, alors qu’elle est plus facilement identifiée chez autrui.
Un recours à l’aide encore marginal et des freins puissants à la recherche d’accompagnement
Moins d’un Français concerné sur deux a cherché un accompagnement spécialisé pour s’en sortir. Ce chiffre tombe encore plus bas pour certaines substances ou conduites “socialement plus acceptées” comme le tabac, les écrans ou le cannabis.
89% des Français considèrent qu’il existe au moins un frein à la recherche d’aide. Le principal obstacle identifié par les personnes interrogées est la peur du regard des autres et la honte d’en parler (58%), suivie du manque d’information sur les personnes ou structures à qui s’adresser (38%).
“Pour réussir à briser le silence, il faut changer le discours moral actuel sur les addictions : reconnaitre leur diversité, déculpabiliser les personnes concernées, et soutenir celles et ceux qui ont déjà osé parler, pour elles-mêmes ou pour leurs proches” affirme Bernard Basset, président d’Addictions France
Les femmes : entre stigmatisation et responsabilité
Plusieurs études ont déjà montré que le genre était une composante dans la prise en charge des femmes en difficultés avec des addictions. Ce public en particulier est davantage confronté à la honte et au jugement social, en raison des normes et des injonctions de genre qui pèsent sur lui.
Pour Jacqueline Kerjean, cheffe du service d’addictologie au Groupe Hospitalier Bretagne Sud Lorient et vice-présidente d’Addictions France :
Si les femmes ont du mal à recourir aux soins lorsqu’on leur parle directement d’alcool, elles évoquent plus facilement des problèmes de santé autres. Et il se trouve que l’alcool est à l’origine de toute une série de problèmes de santé : la tension, le sommeil, etc.
Parmi les personnes ayant un proche concerné par une addiction, les femmes sont plus nombreuses à avoir cherché de l’aide (50% contre 44% des hommes). Si cette différence n’est pas statistiquement significative, elle s’inscrit néanmoins dans un schéma bien connu : la charge inégalement répartie du travail de “care “ dans notre société.
Les jeunes : une sensibilité croissante à l’accompagnement
Les 18-24 ans sont la tranche d’âge la plus encline à chercher de l’aide face aux addictions. Ils sont plus nombreux que la moyenne à solliciter un accompagnement, que ce soit pour eux-mêmes (51 % contre 44 % dans la population générale) ou pour un proche (52 % contre 48 %). Les seules exceptions sont les addictions au cannabis et au tabac, pour lesquelles les jeunes restent dans la moyenne en termes de recherche d’accompagnement.
Pour faire face aux enjeux majeurs que représentent les addictions aujourd’hui, le secteur de l’addictologie, et plus largement du médico-social a besoin de moyens à la hauteur de ses missions. Briser les tabous, changer le regard sur les personnes concernées et mieux orienter les personnes concernées vers les structures d’accompagnement nécessite de faire connaitre à un public large l’accompagnement pluriel existant en addictologie.
Pour Addictions France, il est essentiel de mieux faire connaitre l’action des centres d’addictologie e (CSAPA, CAARUD) présents sur l’ensemble du territoire français. Ils offrent un accompagnement en ambulatoire, pluridisciplinaire, anonyme et gratuit, et s’adaptent aux objectifs que se fixent elles-mêmes les personnes (réduction des risques, maitrise de la consommation ou abstinence).
[1] Sur un échantillon représentatif de 2001 personnes de 18 ans et plus, réalisé en ligne du 17 au 27 mars 2025