Comprendre le handicap mental

Le handicap mental, aussi appelé déficience intellectuelle, désigne une limitation durable des capacités intellectuelles, qui impacte significativement l’autonomie et la vie sociale de la personne. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), il se caractérise par un développement cognitif inférieur à la moyenne et une capacité d’apprentissage réduite. Le niveau de déficience est évalué à l’aide du quotient intellectuel (QI) et peut être léger, moyen, grave ou profond. Ce handicap peut avoir des origines diverses, qu’elles soient congénitales ou liées à des troubles du développement. Il engendre des difficultés dans des domaines variés : compréhension, mémoire, communication, lecture, écriture, calcul, attention ou encore orientation dans l’espace et le temps. L’intensité de ces troubles diffère selon les individus.

Un enjeu de santé publique encore insuffisamment exploré

La question des conduites addictives chez les personnes vivant avec un handicap mental reste peu documentée, bien qu’elle constitue un véritable enjeu de santé publique. Ces personnes sont particulièrement vulnérables face aux risques liés à l’usage de substances ou aux comportements addictifs, en raison de difficultés à appréhender les conséquences de la consommation de produit, d’un moindre contrôle de leur consommation et d’une recherche d’intégration sociale ou de soulagement de la souffrance.

L’Inserm a déjà souligné les nombreuses inégalités d’accès aux soins auxquelles ce public est confronté : dispositifs inadaptés, accompagnement insuffisant, manque de formation des professionnels. Les limitations en matière de mobilité, de communication ou de compréhension renforcent encore les obstacles.

Le comité interministériel du handicap, dans son rapport de 2017, rappelle que la morbidité et la mortalité sont plus élevées chez ces personnes, notamment avec l’avancée en âge, et appelle à mettre en place des actions de prévention ciblées dès le plus jeune âge. Lors des États généraux de la déficience intellectuelle de 2018, l’importance de campagnes de prévention en langage FALC (Facile à lire et à comprendre) a été particulièrement soulignée.

 

Une approche participative pour mieux comprendre les enjeux

La première phase du projet mené par Addictions France en Grand Est repose sur une approche méthodologique combinant entretiens semi-directifs, questionnaires, et revue de littérature, afin de recueillir la parole des personnes concernées, mais aussi celle des professionnels en ESAT, foyers d’hébergement, CMP ou CSAPA. Les échanges ont permis de recueillir des données qualitatives sur les pratiques, les perceptions et les attentes. Une trentaine de personnes ont été interrogées, permettant de cibler les conduites les plus fréquemment observées : consommation de tabac ou de cigarette électronique, usage d’alcool, mais aussi addictions comportementales comme le temps excessif passé sur les écrans ou les jeux vidéo.

Les premiers résultats montrent une méconnaissance générale autour de la notion d’addiction et de la prévention, autant chez les usagers que chez les professionnels.

 

Vers une prévention mieux adaptée : les attentes du terrain

Le diagnostic révèle une attente forte de la part des professionnels médico-sociaux et du soin pour développer une approche plus cohérente avec les besoins spécifiques du public accompagné. Il en ressort une volonté claire de disposer d’outils accessibles, co-construits avec les usagers, d’organiser des formations adaptées, et de renforcer la coordination entre structures médico-sociales et acteurs de l’addictologie. La relation de confiance est désignée comme un élément central dans l’efficacité des démarches de prévention et d’accompagnement.

Les professionnels expriment un besoin concret d’accompagnement : formations ciblées, renforcement du travail en réseau, outils adaptés au niveau de compréhension (supports visuels, langage FALC, vidéos, bandes dessinées, etc.). Les actions doivent être courtes, régulières, interactives et non stigmatisantes pour susciter l’intérêt et favoriser l’adhésion des personnes concernées.

Parmi les leviers identifiés, figurent la mise en place de groupes de parole, le développement d’actions de prévention directement dans les structures (ESAT, foyers, IME), et un recours accru à des intervenants extérieurs (gendarmerie, CSAPA, associations), perçus comme plus légitimes et parfois mieux écoutés par les usagers. La communication via les réseaux sociaux est également vue comme un moyen pertinent pour toucher un public plus jeune, de plus en plus présent sur ces plateformes.

 

Un socle pour les prochaines étapes du projet

Cette phase de diagnostic pose les bases d’une intervention plus ciblée et adaptée. Elle permet de mieux cerner les réalités du terrain, de comprendre les pratiques et les freins, mais aussi de valoriser les ressources déjà mobilisées par les professionnels. Les enseignements tirés permettront, dans les prochaines étapes du projet, de concevoir et tester des outils de prévention adaptés, de former les équipes éducatives et soignantes, et de développer des actions concrètes, en phase avec les besoins réels des personnes vivant avec une déficience intellectuelle.

 

Contact : 

Yaël PANOT – Directeur d’établissement à Addictions France

yael.panot@addictions-france.org – 06 83 75 84 23