Si l’utilisation des écrans a naturellement et fortement augmenté dans les foyers français, il peut être utile de se créer des repères pour favoriser une utilisation équilibrée.

 

Écrans : des bénéfices et des risques

 

Cette crise, à travers le confinement et les mesures de distanciation, met en lumière un rapport paradoxal aux écrans. Comme le souligne Sandrine Charnier, psychologue  clinicienne et élue à l’ANPAA en région Grand Est « ils sont un soutien majeur durant cette période difficile car ils nous permettent d’occuper nos journées et de conserver des interactions sociales qui ont été fortement réduites depuis mars. Nous en tirons de nombreux bénéfices mais à contrario, nous n’avons pas été préparés à cet usage intensif. La relation que nous entretenons avec les outils numériques est complexe. c’est pourquoi, il est important de se rappeler de les utiliser à bon escient tout en étant conscient que nous ne sommes pas tous égaux pour gérer ses limites et son anxiété.». C’est particulièrement vrai face au flux d’informations anxiogènes qu’entretiennent les médias.

L’utilisation des écrans pendant le confinement n’est pas problématique en soi, il faut surtout être vigilant quant à l’évolution de son rapport à eux à l’issue du confinement. Sandrine Charnier, explique ainsi que « les bénéfices de l’utilisation des outils numériques ne sont pas négligeables : ils offrent une aide précieuse durant cette période de confinement en la rendant moins pesante. Pourtant, ils comportent un danger : se replier sur ces outils numériques et ainsi augmenter le risque de développer une addiction ».

Isabelle Levenez, psychologue au CSAPA de Saint-Brieuc, le confirme. La question est de savoir quelle place garderont les écrans après le confinement. D’après la psychologue, il est trop tôt pour mesurer l’ampleur des effets du confinement, mais il faut d’ores et déjà anticiper des répercussions sur les personnes ayant déjà une relation problématique avec les écrans. De plus, Sandrine Charnier précise que « si on part du principe que les personnes sont dépendantes à un comportement (jeux, pornographie…), le fait de rester confinées va les amener à utiliser le moyen qui leur permet de réaliser ce comportement et notamment Internet ».  Avec un accès illimité à internet et l’absence de jugement extérieur sur ses conduites addictives, les personnes déjà en difficulté risquent d’aggraver leurs situations : « quelqu’un qui n’arrive pas à se lever parce qu’il a joué aux jeux vidéo toute la nuit, personne n’en est témoin. Dans ce cas, le confinement pose problème » explique Isabelle Levenez.

 

Quelles précautions prendre pour limiter le risque de comportement addictif ?

 

La problématique se pose en particulier chez les parents de jeunes enfants et adolescents qui s’inquiètent du temps passé sur les écrans par leurs enfants. Pour installer un rapport sain aux écrans et éviter que la situation ne soit conflictuelle lorsqu’il s’agit de gérer l’utilisation des écrans à la maison, Isabelle Levenez conseille de :

  • Avoir une sollicitation de l’extérieur qui vienne perturber l’immersion dans laquelle l’enfant se trouve face aux écrans : par exemple, programmer une alarme pour avertir qu’il est temps de couper ;
  • Prendre du temps pour des activités qui n’utilisent pas d’écran : l’activité physique peut avoir des effets positifs sur l’humeur ;
  • S’efforcer de diversifier les activités pour éviter de passer de l’écran à la tablette puis au smartphone ;
  • Entretenir des repères temporels : fixer un temps pour se lever et pour se coucher, créer un planning prévoyant des pauses dans l’utilisation des écrans (activité physique entre deux usages d’écrans, téléphoner à ses proches sans visio…)

« La simple idée de rentrer et de sortir dans des séquences différentes permet de ne pas être autant absorbé et déconnecté de son quotidien » Isabelle Levenez

 

Et les jeux vidéo dans tout ça ?

 

Des études montrent que le trouble du jeu vidéo* ne touche qu’une petite partie des personnes qui utilisent des jeux numériques ou des jeux vidéo. Sandrine Charnier conseille néanmoins à tout joueur « d’être attentif au temps passé sur les jeux, en particulier si ses activités quotidiennes en pâtissent, ainsi qu’à tout changement physique ou psychologique, sur le plan social et celui de sa santé, qui pourrait être attribué à un comportement de jeu. » 

Concernant les jeunes qui peuvent passer un temps conséquent à jouer à des jeux vidéo, il est important de leur faire adopter des pratiques saines et équilibrées au plus tôt. Pour cela, Sandrine Charnier préconise « de faire une place au jeu vidéo au sein des discussions familiales (ainsi qu’à toute autre activité technologique d’ailleurs). De cette façon, la communication restera ouverte, ce qui permettra de déceler rapidement tout problème de comportement. »

*Le trouble du jeu vidéo est défini dans la Classification internationale des maladies (CIM-11) comme « un comportement lié à la pratique des jeux vidéo ou des jeux numériques qui se caractérise par une perte de contrôle sur le jeu, une priorité accrue accordée au jeu, au point que celui-ci prenne le pas sur d’autres centres d’intérêt et activités quotidiennes, et par la poursuite ou la pratique croissante du jeu en dépit de répercussions dommageables. »