Paroles de pro
Eugénie Thevenon - Infirmière
Plongée au cœur de l’engagement et des défis dans la lutte contre les addictions.
Addictions France donne la parole aux professionnels qui œuvrent au quotidien pour améliorer la santé des personnes confrontées à l’addiction.
Eugénie Thevenon est infirmière au CSAPA de Troyes, dans l’Aube, et finalise sa formation en pratique avancée. Elle partage ici son parcours, son engagement, et la façon dont ses nouvelles missions renforceront dès juillet 2025 le travail en équipe pluridisciplinaire au service des personnes accompagnées.

Comment avez-vous découvert l’association ?
J’ai découvert l’association grâce à une offre d’emploi, et j’ai tout de suite trouvé ce domaine particulièrement intéressant. J’ai rejoint le CSAPA de Troyes en janvier 2021. Avant cela, je travaillais comme infirmière en santé mentale à l’Etablissement Public de Santé Mentale (EPSM) de l’Aube, et en parallèle, je me suis formée à l’hypnose ainsi qu’en thérapies brèves, compétences que je mets à profit dans le cadre des accompagnements à l’association et aussi en cabinet.
Pourquoi avoir choisi de travailler en addictologie ?
L’addictologie est une spécialité très riche, humaine et en constante évolution. Cette discipline comporte une dimension essentielle de santé mentale et concerne tous les publics et tous les âges : personnes en situation de handicap, en grande précarité ou socialement « insérées ». Le volet prévention me parle aussi beaucoup. A Addictions France, ce que j’apprécie, c’est l’implication de chacun et la qualité du travail mené, avec précision et rigueur, par des professionnels issus de différents horizons. Cette diversité se retrouve dans les échanges et les missions. Très vite, j’ai trouvé ma place dans un cadre stimulant qui laisse place à l’autonomie.
En tant qu’infirmière, quelles sont vos missions au sein du CSAPA ?
Jusqu’à présent, j’ai partagé mon temps entre le soin et les actions de prévention. Par exemple, je suis impliquée dans le programme TABADO, que j’ai porté pendant trois années scolaires : une au lycée des Lombards à Troyes et deux autres au Lycée Val Moré. Il s’agit d’un programme de prévention du tabagisme auprès des jeunes, avec des consultations individuelles d’aide à l’arrêt du tabac et des groupes motivationnels. J’ai également contribué à la création d’une consultation infirmière avancée au Lycée professionnel Val Moré à Bar-sur-Seine, et je mène des actions de sensibilisation auprès des jeunes suivis par la Mission locale.
Concrètement, comment s’organise votre quotidien ?
Je suis en formation en “pratique avancée” depuis bientôt deux ans et je termine mon cursus en juin 2025. C’est une formation exigeante, à temps plein, qui nécessite un investissement important. J’ai déjà validé la partie théorique, et j’ai effectué plusieurs stages dont un en médecine interne au centre hospitalier de Troyes en première année et les autres en addictologie sur le département. Mon objectif était de mieux connaître le réseau local en addictologie afin de préparer mon exercice à venir. Je vais effectuer mon dernier stage à l’Etablissement public de Santé Mentale de la Marne, à Châlons-en-Champagne, dans une unité de sevrage complexe.
Pourquoi avoir souhaité intégrer une formation en pratique avancée ?
Pour moi, c’était la suite logique de mon cheminement professionnel. Dès mon arrivée, j’ai évoqué ce projet avec ma cheffe de service, le médecin et la directrice d’établissement. La pratique avancée me permettra d’élargir mon champ de compétences et de responsabilités, avec une spécialisation en santé mentale, mais aussi de gagner en autonomie pour contribuer différemment à l’accompagnement des personnes avec de nouvelles possibilités de coopération.
Ce qui est très appréciable dans l’association, c’est qu’il y a une volonté de faire évoluer les professionnels, d’investir dans la formation et d’ouvrir des perspectives de carrière. On m’a tout de suite soutenue dans cette démarche, et cela a été une vraie chance.
Comment cette évolution professionnelle contribuera-t-elle à améliorer l’organisation du CSAPA ?
L’intégration d’un poste en pratique avancée implique une nouvelle organisation au sein du CSAPA. Elle est en train de se structurer et s’appuiera sur un protocole de collaboration formalisé avec le médecin référent et la directrice de l’établissement.
L’objectif est double : mieux répondre aux demandes de prise en charge et fluidifier les parcours des personnes accompagnées. Le poste est en cours de structuration, et je prendrai mes nouvelles fonctions en tant qu’infirmière en pratique avancée à compter du 1er juillet 2025. Des consultations sont déjà planifiées pour permettre une transition fluide vers mon nouveau poste.
Les modalités de mise en œuvre et d’intégration de la pratique avancée peuvent différer selon les spécificités et les besoins propres à chaque territoire.
Quels actes pourrez-vous réaliser une fois diplômée ? Quelles seront les principales évolutions au sein du CSAPA pour renforcer l’accompagnement ?
Ce projet est pleinement soutenu par le Dr Martinot, médecin du CSAPA, qui y voit une opportunité de renforcer notre dispositif. L’idée est de collaborer étroitement afin de dégager davantage de temps médical et d’améliorer l’accès aux soins.
Dans le cadre du protocole de collaboration en cours d’élaboration, je pourrai renouveler des prescriptions médicales, notamment en santé mentale et en addictologie. Je serai également habilitée à réaliser des examens cliniques, prescrire des bilans biologiques, orienter vers des cures, ou encore demander des examens complémentaires.
Concrètement, je pourrai assurer certaines permanences en addictologie, réaliser les premières évaluations pour le suivi des patients, et faire le lien avec les médecins généralistes. L’objectif est d’être une porte d’entrée supplémentaire dans le parcours de soins, pour faciliter l’accès et garantir un suivi plus fluide.
3 mots pour décrire votre métier ?
Riche – Stimulant – Evolution
La pratique avancée ?
La pratique avancée vise à répondre aux nouveaux enjeux d’un système de santé en mutation. Les premières promotions d’infirmiers en pratique avancée ont débuté leur formation en 2018. Ce nouveau champ professionnel permet aux infirmiers d’élargir leurs compétences cliniques. Une fois diplômés, ils sont en mesure de renouveler, adapter, voire prescrire certains traitements ou examens, d’assurer un suivi clinique, et de mener des actions supplémentaires de prévention et de dépistage. Ces activités s’effectuent en coordination avec les médecins, qui leur délèguent le suivi de patients dont la situation est stabilisée. Leur exercice se fait obligatoirement au sein d’une équipe pluriprofessionnelle, par exemple dans une maison ou un centre de santé, un établissement hospitalier ou médico-social. En plus de contribuer à réduire les délais d’accès aux soins, la pratique avancée constitue une réponse innovante aux besoins de santé croissants de la population, en particulier face au développement des maladies chroniques et au vieillissement.
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Salomé Maisonneuve, Chargée de prévention et de formation