Proposition de loi Influenceurs
Addictions France appelle les sénateurs à protéger les jeunes de l’addiction à l’alcool
Lorsque la “loi de la jungle” sévit sur les réseaux sociaux, il est crucial de légiférer pour protéger les jeunes générations des risques liés à la promotion de produits à risques pour la santé. Pour l’alcool, toutes les techniques marketing utilisées sur les réseaux sociaux convergent vers un même objectif : inciter les jeunes à boire. La proposition de loi contre les dérives des influenceurs sera discutée au Sénat le 9 mai et les parlementaires ont le pouvoir d’agir contre cette pression publicitaire outrancière.
Pourquoi influenceurs et marques d’alcool ne devraient pas faire bon ménage
Scarlett Johansson, Carlos et Michael Schumacher ont un point commun : par le passé, les marques d’alcool qui les ont sollicités pour une publicité ont été condamnées par la justice. La raison est simple : en utilisant l’image des célébrités, l’industrie de l’alcool se rend trop attractive aux yeux des jeunes.
En 2023, les codes du marketing ont évolué, et les alcooliers ont massivement recours aux réseaux sociaux pour promouvoir leurs produits. Influenceurs et célébrités se mettent en scène avec des marques d’alcool, et c’est précisément ce que dénonce Addictions France. Pour une marque, utiliser la proximité construite entre un influenceur, une célébrité et leur communauté est particulièrement efficace pour toucher un public jeune, incité à boire davantage.
Face à cette dérive, la proposition de loi sur les influenceurs rappelle juste que la loi Evin s’applique. Addictions France, qui sensibilise en vain les influenceurs depuis près de deux ans, alerte sur l’inefficacité de ces dispositions en matière de santé et de finances publiques : déferlement de publicités, impossibilité de tout contrôler, poursuites judiciaires chronophages… Pour l’association, le plus simple est d’interdire à l’industrie de l’alcool de faire appel à des influenceurs et à des artistes pour promouvoir ses produits.
L’industrie de l’alcool assure ses profits par des pratiques illégales et délétères
Trois exemples illustrent les pratiques des industriels sur les réseaux sociaux :
- Sur les réseaux de la marque FEFE, le rappeur SCH (3 millions d’abonnés environ) se montre au milieu des vignes, buvant et affichant la nouvelle canette « x19 » conçue par l’artiste. Nous pourrions également citer le clip de sa chanson Autobahn, qui cumule déjà plus de 14 millions de vues sur Youtube et présente sans vergogne des marques d’alcool comme FEFE ou Budweiser.
- Avec plus d’une centaine de posts pro-alcool dont une bonne partie sur le vin Côtes des Roses commercialisé par l’industriel Gérard Bertrand, Anna RVR, influenceuse aux 486K abonnés, présente ses goodies spécialement conçus pour un kit de vente « Côtes des Roses x Anna RVR », dans un univers glamour qui rappelle les vacances, mais en omettant sciemment que l’abus d’alcool est dangereux pour la santé. Addictions France a essayé de contacter Anna RvR et son agence, sans succès, pour leur demander de retirer ces publications.
- Les vidéastes et influenceurs Pierre Croce et Benjamin Verrecchia (Chef Verrecchia) ont diffusé une vidéo dans laquelle ils testent les boissons les plus alcoolisées au monde.
Dans les trois cas, Addictions France a lancé une action en justice. Pour Pierre Croce, la justice a statué : la vidéo est illégale, il a été condamné à une amende et au retrait de la vidéo. Alors que Pierre Croce et Anna RVR avaient suivi la formation d’influenceur responsable de l’ARPP (Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité, géré par les industriels), force est de constater que l’autorégulation des pratiques par les industriels et les influenceurs – piste d’action privilégiée aujourd’hui par le Gouvernement – est inefficace. Devoir agir en justice pour chaque infraction constatée n’est pas non plus la solution.
La loi Evin a introduit, en 1991, l’interdiction de la publicité alcool à la radio et à la télévision dans le but de protéger les plus jeunes en ce qu’ils sont particulièrement influençables. Les parlementaires ont aujourd’hui la responsabilité de poursuivre le travail de leurs prédécesseurs et de mettre fin aux pratiques abusives des marques via les influenceurs.
Alcool & Célébrités, du statut d’ambassadeur à celui de créateur
Outre la publicité via des influenceurs, Addictions France constate de plus en plus de collaborations pour la “co-création” de bouteilles en édition limitée entre un artiste et une marque d’alcool, à l’instar de l’exemple de SCH. Le but : nous faire oublier qu’il s’agit de publicité et contourner la loi, en présentant les célébrités comme des parties prenantes du processus de fabrication et non plus comme de simples ambassadeurs de publicité.
Olivier Rousteing, directeur artistique de la maison Balmain, s’est ainsi associé à Chivas (groupe Ricard) pour la création exclusive d’une bouteille en édition limitée Chivas XV. Pour en faire la promotion, un pop-up store dédié a été installé fin 2021 aux Galeries Lafayette ainsi qu’une fête parisienne “en grande pompe” en présence du créateur qui fut largement relayé sur les réseaux sociaux de la marque. L’objectif : augmenter le prestige de l’entreprise, en le reliant à l’univers de la mode et de la haute-couture.
Un autre profil encore plus international et aux communautés très larges : Lady Gaga. La chanteuse mondialement connue a en effet été débauchée par la marque de champagne Dom Pérignon pour la co-création d’une cuvée “Dom Pérignon x Lady Gaga”, aux allures féminines et pop ressemblant à l’univers de l’artiste. Elle a dédié pour l’occasion une performance artistique chantée et dansée à la marque, diffusée sur ses réseaux sociaux personnels. Les deux dossiers seront plaidés le 10 janvier 2024 devant le TJ de Paris.
Pour Lady Gaga et Olivier Rousteing, la méthode est la même : des campagnes de publicité massives sur internet et via un affichage public, ainsi qu’une reprise sur l’ensemble de leurs réseaux sociaux. Derrière ces partenariats, un contournement évident de la Loi Evin.
À propos d’Addictions France :
Reconnue d’utilité publique et agréée d’éducation populaire, Association Addictions France (anciennement ANPAA) est un acteur majeur et historique de la santé publique fondé en 1872 par Louis Pasteur et Claude Bernard. Composée de professionnels du médico-psycho-social, de la prévention et du plaidoyer, l’association agit au plus près des populations et intervient sur toutes les addictions (tabac, alcool, cannabis, médicaments psychotropes, pratiques de jeux excessives, drogues illicites et autres addictions sans substance).
En plus d’informer, de sensibiliser et de faire de la prévention pour tous les publics, elle gère plusieurs dizaines de centres en addictologie en France métropolitaine et en Outre-mer, propose des formations auprès des professionnels, tout en veillant au respect et à la défense de la Loi Evin. Addictions France porte finalement un projet de société dans lequel la problématique des addictions n’est ni un tabou, ni une fatalité : ensemble, changeons le regard sur les addictions !
Contacts presse :
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